STUDIO ANDREW TODD
Parlé dans le vide
Conception d'exposition PQ 2011
A l'invitation de la Quadriennale de Prague 2011 de Performance Design et Espace, notre agence a préparé une proposition pour l'Exposition nationale française ; le projet n'a pas été construit en raison de questions de financement.
Cette proposition part du principe que l’exposition de sujets liés à la performance exige une approche particulière. Montrer des accessoires, des costumes ou des maquettes dans ce contexte est terriblement réducteur par rapport à ce que sont réellement les arts théâtraux. Le film des performances a une certaine valeur documentaire, mais il réduit aussi le caractère quadridimensionnel et en temps réel du théâtre, en supprimant la valeur de l’interaction et de l’intersubjectivité. Prétendre organiser une performance en direct dans le contexte d’une exposition internationale soulève toutes les questions qui compromettent l’art vidéo et l’installation : il faut créer un contexte (acoustiquement fermé ou limité) et fixer un temps (incompatible avec la circulation et la navigation des visiteurs de l’exposition).
Ce qui est proposé ici est un objet unique, un événement unique et un contenant qui peut intégrer un certain niveau de contenu « d’exposition » et documentaire sans exclure la possibilité d’une rencontre en temps réel et en direct.
S'inspirant des représentations néoclassiques françaises de formes monumentales « idéales » pour la contemplation, la démocratie et le spectacle (comme le projet de prison de Ledoux et le célèbre opéra et cénotaphe de Boullée pour Newton), elle propose une géométrie platonicienne d'échanges et de représentations démocratiques non planifiées. C'est aussi une forme particulière de « l'espace vide » promu par Peter Brook.
On s'approche de la sphère de 5 mètres de diamètre et on découvre un trou à hauteur de tête (que ce soit au sol ou au niveau de la galerie). Sans autre instruction, on devient un membre désincarné de la communauté intérieure, le sens du toucher et la capacité de mouvement étant isolés de la tête sensible, qui existe dans une relation intersubjective avec les autres visiteurs rassemblés au hasard.
Que se passe-t-il alors ? Quelle est la surprise dans cette sphère magique ? Un simple dispositif de deux vidéoprojecteurs motorisés, un petit vari-light et des haut-parleurs pilotés par une cabine de commande à distance créent un environnement interactif dans lequel les têtes filmées de grands professionnels du théâtre français font des commentaires qui sont montrés en juxtaposition (Peter Brook « débat » avec Ariane Mnouchkine, avec Patrice Chereau, avec Luc Bondy). Parfois, le commentaire s'arrête pour montrer une scène d'une production. D'autres fois, la nuit tombe et un projecteur éclaire un spectateur ; une « voix de Dieu » lointaine lui demande son avis sur ce qui vient d'être dit. Parfois, un apprenti comédien se faisant passer pour un membre du public est illuminé et lance un débat sur une question donnée. A certaines heures de la journée, des débats sont programmés sur des thèmes donnés avec des animateurs connus. Le public est incité à revenir régulièrement dans la sphère car le contenu est quelque peu aléatoire et improvisé.